THE OTHER SIDE.
PV → Prince Étoilé.

« Non ! »

Un grognement sourd sortit de ta gorge et bientôt une multitude de pleurs sourds. Une fois de plus, ce satané piaf venait de s'envoler trop tôt, une fois de plus, tu avais bondi trop tard, trop tard pour l'attraper, mais au moment opportun pour que ses serres t'arrachent, dans un douloureux cri, la vue. Une fois de plus, tu subis la décadence de ta vue. Incapable d'ouvrir tes paupières dans un premier temps, parfaitement immobile, replié sur le sol, tu tentes de calmer cette douleur qui irradie tes yeux. Enfin, quand tu es prêt à revoir la lumière du jour, tu rouvres délicatement tes paupières. Le soleil tapant commence par t'arracher une lamentation presque inaudible. Tu sais que rapidement, tu te désoleras que le soleil n'ait plus cet effet là sur tes yeux. Tu sais ce qu'il va t'arriver. L'inévitable approche. Les formes que tu voyais plus ou moins nettement deviennent floues. Elles ondulent. Tout s'assombrirent. Tu ne peux bientôt plus voir ce qui est loin. Ce qui est prêt perd en éclat, les couleurs ne sont plus, puis, sans lancer un dernier appel, le noir, le néant naît. Un cri silencieux s'échappe de ta gorge alors que tu te débats comme tu l'as déjà fait mille fois.

« Oh ! Larme du Vent ! Va voir faire profiter de ton énergie débordante dehors, il y en a qui voudraient encore profiter des dernières lueurs matinales pour dormir ! »

Une fois de plus, tes rêves sont plus réels que n'importe quoi. Chaque fois que tu faisais ce rêve qui virait au cauchemar, chaque fois que ces souvenirs douloureux remontaient à la surface, on te faisait les mêmes reproches, comme si dans ton sommeil, tu bataillais comme dans ton rêve pour ne pas perdre la vue. Malgré tout, tout était vain. Tu lâches un profond soupire d'ennui. Cette situation ne te plaît pas plus qu'elle plaît aux autres Guerriers. Sans même ouvrir les paupières, tu bredouilles une excuse. Tu sais que tu dois t’exécuter. Tu profites encore quelques secondes de ta litière tendre et moelleuse et de cette nuit de sommeil qui, une fois de plus, t'en auras fait voir de toutes les couleurs. Enfin, tu lèves le museau, tu le laisses humer l'air et te rends alors compte du nombre de Guerrier encore présent dans la tanière. Bien que tu ne sois pas capable de déterminer le moment de la journée grâce à la vue, l'odorat était un bon facteur, tout comme l'ouïe. Les ronflements de certains se faisaient entendre et les litières de quelques autres étaient vides, tout juste assez de Guerriers pour former une petite patrouille. Un sourire s'arme de force sur ton visage alors que tu ouvres tes paupières sur le noir totale. Tu ne sais même plus pourquoi tu les ouvres, à quoi bon ? Les ténèbres te rattrapent toujours, pourquoi ne pas les accepter ? Un dernier soupir te parcoures alors que tu passes l'entrée de la tanière, te faisant légèrement bousculé sur ton passage. Te croyant en tort, tu te recroquevilles et recule pour laisser passer le Guerrier retournant dans la tanière, bredouillant à son passage des mots d'excuses des plus sincères.

« Salutations ! »

À peine le nez dehors qu'un félin t'aborde. Sa voix seule te permet de l'identifier et un sourire mi-gêné, mi-amical s'affiche sur ton visage. Tu laisses ton museau humer l'odeur que porte le pelage du matou et la fragrance vient confirmer tes pensées. Pourquoi diable est-ce que le Prince Étoilé en personne décide de te parler ? Une fois de plus, même si tu ne vois rien, tu es certains qu'il s'adresse à toi. Le léger vent qui balaye le camp te donne sa position et tu es capable de sentir son regard braqué sur toi. Hésitant, tu laisses ton corps se recroquevillé légèrement devant lui. Reprenant rapidement tes esprits, tu t'abaisses davantage et exécute un salut solennel, bien que légèrement maladroit, ne lâchant pas cette expression d'innocence répugnante. Ayant toujours pensé que cela pouvait être angoissant, tu ne laisses pas ton regard s'accrocher à celui de ton Chef, mais tu le poses sur l'emplacement où tu devines son corps. Tu ne souhaites imposer la vue de tes yeux à personne. Pour avoir déjà vu de vieux chats perdre la vue, tu sais très bien l'horreur que c'est de fixer ces globes oculaires ayant perdu tout éclat, tout signe de vie et d'une blancheur cadavérique. Et malgré tout ce que Farce de l'Épine peut dire, tu sais très bien que tu sois dans le même état que ces vieux matous. Prenant ton courage à deux pattes et ne souhaitant pas faire attendre un chat du rang de Prince Étoilé, tu finis par bredouiller timidement.

« Salutations Prince Étoilé, comment vous portez vous de si bon matin ? »